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Quand nos clubs de natation plongent dans les Jeux paralympiques
Le Raincy, Drancy, Saint-Ouen, Les Lilas : ils étaient 4 clubs de natation de Seine-Saint-Denis à être venus dimanche matin suivre les Jeux paralympiques dans leur sport de coeur. Jade, Inaya, Neila, Julia, Mahée en sont reparties avec des souvenirs plein les yeux, impressionnées par les performances des nageurs paralympiques.
« Incroyable. Déjà il va plus vite que moi. Il passe en 42’’ au 50 m brasse alors que moi je fais 45’’.» Mahée, 26 ans, est impressionnée par la performance du Suisse Leo McCrea sur le 100m brasse SB5, réservé aux nageurs présentant un handicap physique.
Dans la pénombre de l’immense La Défense Arena bien garnie pour un dimanche matin, la nageuse de l’AS Natation Le Raincy profite pleinement du moment aux côtés de ses camarades de club.
Organisateur de la sortie, le Comité 93 natation a reçu une vingtaine de places de la part du Département pour emmener des jeunes de différents clubs aux épreuves de para-natation. Sont donc de la partie le club du Raincy, mais aussi ceux de Drancy, de Saint-Ouen et des Lilas.
Après les traditionnels trois coups donnés – heureux hasard – par Claire Supiot, nageuse olympique puis paralympique qui a donné récemment son nom à la piscine de Pierrefitte, nos 20 veinards ont plongé dans le bonheur.
« On voulait emmener des jeunes de nos clubs, déjà parce qu’on sait qu’en Seine-Saint-Denis, les gens n’ont pas forcément les moyens de se payer une place aux JO. Ensuite, c’est forcément un événement marquant, qui peut être inspirant à cet âge. Et puis, ça peut constituer une bonne sensibilisation au handicap. », commente Adeline Thénot, membre du Comité 93 natation, elle-même nageuse et entraîneure au club de Drancy.
“Des nageurs avec une histoire”
Pour ce qui est de la sensibilisation au handicap, la mission est d’ores et déjà réussie. « Ce que je trouve intéressant, c’est que les nageurs paralympiques ont une histoire derrière eux. Du coup, leur performance est encore plus impressionnante, estime ainsi Celia, 13 ans, inscrite au club du Raincy et venue ce matin-là avec sa petite sœur Alexia, 9 ans, et sa maman Valentine.
Et de parler spontanément du Brésilien Gabriel Araujo, nageur sans bras qu’elle a vu dans « Incassable », série documentaire de France Télévisions. Coup de chance : le voici justement sur la série du 150m 3 nages, une épreuve spécifique aux nageurs paralympiques. Et le nageur auriverde ne la déçoit pas : surclassé en catégorie SM3 alors que son handicap, plus lourd, correspond à SM2, le nageur se classe 3e de la course et bat le record du monde de sa catégorie : 3 minutes 15’06’’.
« Moi ce qui m’a plus marquée, ce sont les nageurs déficients visuels. Vous imaginez, faire le virage sans voir le mur, c’est super fort ! », renchérit Neila, licenciée à l’USMA Saint-Ouen. Si vous lui demandez, cette jeune nageuse vous expliquera sans peine que les nageurs virent grâce à un « tapper », un assistant hors du bassin qui, à l’aide d’une légère tape avec une perche, leur indique que le mur approche.
Julia, 16 ans, qui aspire à disputer un jour les JO, s’enthousiasme quant à elle pour les Françaises en lice ce matin-là. Sur 100m nage libre catégorie S10, autrement dit les nageurs privés de leurs membres inférieurs, elle est servie : Emeline Pierre se qualifie brillamment pour la finale, 1ère de sa série (et sera d’ailleurs sacrée le soir même championne paralympique) tandis qu’Elodie Lorandi est éliminée avec les honneurs.
« Franchement, respect. Ils font des temps incroyables alors qu’ils ont un handicap. Je me sens particulièrement chanceuse d’être ici », explique cette nageuse du Raincy, club qui accueille d’ailleurs un nageur en situation de handicap mental dans un de ses groupes d’entraînement.
« C’est un adolescent. Il nage au club depuis un bout de temps. Le but étant bien sûr l’inclusion, il s’entraîne avec d’autres enfants, avec un entraîneur qui a été formé pour accueillir ces publics. », explique Patrick Chapuis, au bureau du club depuis 3 ans et qui ne serait d’ailleurs pas opposé au fait d’accueillir d’autres personnes en situation de handicap. Et l’encadrant de poursuivre : « On était déjà venu vendredi avec un autre groupe. Ca a bien marché. Les épreuves ont suscité pas mal de questions chez les enfants : comment les nageurs sans mains font-ils pour toucher le mur, comment font-ils pour virer, en gros comment font-ils pour faire aussi bien sinon mieux que les valides ?
Deux bassins de l’Arena de Nanterre redéployés dans le 93
Adeline Thénot, du Comité 93, avait aussi une autre raison de regarder l’Arena de Nanterre avec les yeux de l’amour : après les Jeux, le bassin olympique des exploits d’Ugo Didier et Léon Marchand va être démonté et réinstallé à Sevran, qui ne compte pour l’instant qu’un bassin de 25 m vieillissant. Le bassin d’échauffement des Jeux devrait lui aussi atterrir dans le 93, plus précisément à Bagnolet. « C’est une vraie bonne nouvelle pour la Seine-Saint-Denis, qui accuse une certaine pénurie de bassins et où un élève sur 2 ne sait pas nager à son entrée en 6e. Tout ça devrait favoriser l’apprentissage de la natation des plus jeunes, même s’il faut aussi que cela suive au niveau des écoles et sur la formation des maîtres-nageurs », se félicite-t-elle.
Dans le RER E qui ramène Neila, Inaya, Jade et compagnie vers Saint-Ouen, il n’y a en tout cas qu’un seul sujet et ce n’est pas la rentrée scolaire. « Ce matin, on a des souvenirs pour la vie », sourit Inaya.
Christophe Lehousse