Vous avez appris le piano à 5 ans puis taquiné la trompette après avoir découvert le violoncelle. D’où vient cette passion pour la musique ?

Tout petit, j’entendais ma soeur chanter et jouer du piano, ce qui m’émerveillait. J’ai donc débuté le piano au conservatoire de Bagnolet avec un professeur formidable Mohamed Klipic qui m’a toujours encouragé, malgré mon agénésie. Le fait d’avoir l’oreille absolue (NDLR : la capacité de reconnaître les notes de façon automatique) et harmonique m’a sans doute aidé. Plus tard, je me suis orienté vers le violoncelle, même si le fait de n’avoir que sept doigts m’a fermé un certain nombre de portes.
En 2014, je suis rentré au Conservatoire à rayonnement régional de Paris où la professeure Marie-Paule Milone m’a tout de suite pris sous son aile en m’incitant à persévérer, avec l’aide d’un ergothérapeute et d’une prothèse adaptée. Quelques années plus tard, l’obtention du Diplôme d’études musicales (DEM) avec félicitations du jury m’a rassuré sur le bien-fondé de mon orientation autour de ma passion. Je joue maintenant une fois par an avec l’orchestre du Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (CNSM) à la Philharmonie, ce qui est un grand plaisir.

En 2019, vous recevez un instrument sur mesure qui vous fait faire des bonds de géant en musique…

Oui et c’était sans doute le plus beau jour de ma vie… En l’espace de quinze jours, cinq luthiers de l’association Talents et Violon’celles, que je garderai toujours dans mon coeur, se sont mobilisés pour me construire un violoncelle inversé. Cet instrument, façonné sur le modèle du célèbre Guarneri exposé à la Cité de la Musique de Paris, s’adapte parfaitement à mon corps et à ma pratique au niveau des cordes, du manche, du chevalet, de la barre d’harmonie à l’intérieur ou des sonorités au niveau des graves, des aigus… Savine Delaporte, Joël Klépal, Antoine Lescombe, Virginie Pezet-Berton, Jean-Louis Prochasson me l’ont remis le dernier jour du Festival de la Grange de Meslay en Touraine auquel je participais en tant que musicien. C’était très émouvant de me retrouver face à ce nouvel instrument blanc, non encore verni et de jouer devant le public.

 

 

Depuis quelques années, vous enchaînez les prix aux concours de violoncelle, les tournées dans les plus grands festivals. Ce n’est pas trop fatigant ? 

Mon parcours d’études m’incite à multiplier les concerts et j’ai la chance d’en réaliser beaucoup au sein de Cello 8, un octuor de Talents et Violon’celles avec qui on a enregistré l’album “Ode à la nuit”. Depuis deux ans, nous avons enchaîné les tournées et les spectacles, souvent dans des conditions extraordinaires. La Folle Journée de Nantes où l’on a joué devant 2000 personnes a été un très beau souvenir et la certitude que j’ai toute ma place en tant que musicien professionnel, malgré les difficultés rencontrées face aux institutions.
J’ai toujours voulu faire du violoncelle comme tout le monde et m’adapter à un système encore archaïque en terme d’acceptation du handicap dans la pratique de la musique classique. Les choses changent doucement, en partie grâce aux avancées technologiques. A ce propos, des élèves de l’école d’ingénieurs Centrale Supélec devraient bientôt me créer une nouvelle prothèse pour rendre optimale ma prise de l’archer. C’est une belle synergie qui va être mise en place…

 


 

Vous allez participer dans les prochains jours aux concerts de clôture des Jeux paralympiques au Théâtre du Châtelet. Pourriez-vous nous en parler puis évoquer vos prochains projets ? 

Les spectacles Laissez-nous danser, labellisés Olympiade culturelle par Paris 2024, rassemblent plus de 300 artistes, dont des instrumentistes, des choristes, des danseurs, des comédiens… dont un certain nombre sont en situation de handicap. La ligne rouge se concentre sur l’histoire et les valeurs de l’olympisme, avec la danseuse Vitoria Bueno, née sans bras, qui sera l’invitée d’honneur. On espère que le public prendra autant de plaisir à nous écouter que nous en avons eu à préparer ces concerts.
Pour les années à venir, je souhaiterais poursuivre ma formation à l’étranger, devenir soliste et idéalement faire une carrière internationale. De manière plus personnelle, j’aimerais que le champ musical s’ouvre à l’inclusion, comme dans le domaine du sport et pour ce faire, créer ma propre structure. La musique m’a ouvert aux autres car je m’exprime mieux avec mon violoncelle qu’avec des mots. J’espère de tout coeur que mon exemple incitera d’autres passionnés à oser se lancer et s’épanouir dans la musique, sans considérer le handicap comme un frein.

Concerts Laissez-nous danser ! vendredi 6 septembre à 19h30, samedi 7 septembre à 18h30 et dimanche 8 septembre à 15h (sur listes d’attente) au Théâtre du Châtelet, 2 rue Edouard-Colonne à Paris.
Entrée libre

Crédit-photo : Talents et Violon’celles

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