Ça ressemble à un vélo, mais en plus long, avec deux selles, deux guidons, deux pédaliers, deux chaines, deux roues et deux cyclistes ! Le para-tandem permet à des non ou mal voyants de participer à des courses cyclistes, accompagnés par un pilote qui lui est voyant. « Son rôle est crucial, explique Olivier Donval, il est en charge de la sécurité de l’équipage, des changements de vitesse, de donner des informations à son coéquipier. Avec l’habitude, il se crée une certaine osmose entre les deux coureurs, on « sent » comment est l’autre, à sa façon d’appuyer sur les pédales, son attitude… » Une entente essentielle, qui permet de se passer presque complètement d’échanges verbaux, et heureusement car ce ne serait pas évident de se lancer dans une discussion à plus de 50 km/h avec le cœur à près de 200 pulsations minutes ! « La prise de décision doit être super rapide. Si on doit se mettre en danseuse dans une « bosse » (une montée en jargon cycliste), on lance juste « Hop ! ». A l’amorce d’un virage « attention virage », on utilise seulement des mots clefs. ». L’un des signaux les plus importants, c’est sans doute celui détermine si oui ou non on lance ou on contre une échappée. « C’est un « On y va ? » suivi d’un « On y va » ou « On y va pas ». La décision doit être immédiate, car une seconde d’hésitation et c’est 10 à 15 mètres de perdus par rapport à l’échappée ! »

 

Plus de soutien de la part de la fédération de cyclisme

Si aujourd’hui la stratégie reste la même par rapport aux années de course d’Olivier, les conditions ont bien changé depuis les années 90. « Le manager général de l’équipe de France, Laurent Thirionet, a obtenu plus de soutien de la part de la fédération française de cyclisme qui travaille en partenariat avec la fédé handisport. Alors que nous pouvions nous entraîner une ou deux fois dans l’année sur piste, l’équipe para a désormais accès 5 jours par mois au vélodrome national de Saint-Quentin en Yvelines. Les athlètes sont plus soutenus, le matériel est payé… L’entraînement suit une démarche scientifique, des tests sont réalisés en soufflerie. Le staff travaille aussi bien à un projet individualisé pour chaque coureur qu’à un projet collectif. Résultat la France est passée de la 20e à la 1ère place ! » Et depuis le début de la semaine, les Tricolores moissonnent les médailles sur la piste comme sur la route à Clichy-sous-Bois !

Olivier Donval et John Saccomandi avec leur beau maillot arc-en-ciel de champions du monde, lorsqu’ils couraient pour Auber 93.

Sur son tandem, Olivier Donval était associé à « John Saccomandi, un pote. Désormais le staff de l’équipe de France cherche qui serait le meilleur pilote pour chaque coureur. Alexandre Lloveras a désormais comme pilote Corentin Ermenault, qui a été double champion d’Europe de poursuite individuel chez les valides. Avec John, nous sommes toujours amis, nos familles se connaissent et nous nous faisons toujours au moins une sortie de vélo par an. »

Le contre la montre, pas l’épreuve préférée d’Olivier Donval, mais tout de même 8e aux Paralympiques d’Athènes 2004, 7e à ceux de Pékin 2008, 10e à Londres en 2012.

 

Contre la montre ou course en ligne ?

A tandem comme à vélo, on dispute le contre la montre et la course en ligne. « Le contre la montre, il faut envoyer, point barre. J’ai toujours préféré le côté filou des courses en ligne ! » glisse Olivier avec un sourire en coin. « La tactique fait partie du jeu, il faut jouer avec le peloton. En championnat du monde il y a une cinquantaine de tandems, ça frotte. Aux Jeux, ils ne sont qu’une vingtaine, mais le niveau est plus relevé. A Clichy, comme il y a une bosse, les échappées sont possibles. Mais laquelle sera la bonne ? Celles du début, ou bien proche de l’arrivée ? On ne sait jamais et il faut se décider très vite. A Pékin, lorsque nous avons eu notre médaille de bronze, nous sommes partis avec deux autres après seulement 1 km, et c’est allé au bout ! »

Olivier Donval était le premier relayeur de la flamme paralympique à Montfermeil.

Les arrivées au sprint sont également assez courantes, et avec toute la place que prennent les tandems, la synchronisation des deux coureurs, c’est très impressionnant ! « Une des données importantes, c’est la mécanique. Les casses sont fréquentes car il n’existe pas de matériel spécifique pour les dérailleurs, les chaînes… Et nous sommes deux à pédaler, deux fois plus de puissance ! A la relance, en sortie de virage, il faut à la fois être efficace mais aussi fluide pour ménager le matériel. Les bris de chaîne arrivent également. A Pékin, nous étions trois tandems échappés, nous avions bien lancé le sprint de loin, nous étions puissants… Et nous avons tordu le pédalier. Donc, médaille de bronze… En tout cas, moi je serais là le jour de la course en ligne, ce sera du spectacle ! »

Georges Makowski

Photos : Jacques Guillaume, Franck Rondot