Depuis le 7 mars, l’équipe de France de plongeon sort enfin la tête de l’eau. Pour la première fois depuis un an, les Bleus n’ont pas à prendre le train en direction de Strasbourg, de l’Allemagne ou de l’Angleterre pour aller s’entraîner et partir à la recherche d’une denrée si rare, voire quasi-inexistante, en France : les plateformes à 10 mètres. Trois fois par semaine, cette délégation composée d’une dizaine d’athlètes emprunte, depuis l’INSEP, au cœur du bois de Vincennes, le périph’ puis un bout d’autoroute A86 pour atteindre le tout nouveau, tout beau Centre aquatique olympique (CAO) situé à proximité du Stade de France. Trente minutes de voiture valent toujours mieux que 3 heures de train…

Spécialement conçue pour les Jeux (lire encadré ci-dessous) et destinée à accueillir lors de la compétition les épreuves de natation artistique, de plongeon et les phases préliminaires de water-polo, l’enceinte de 5000 places, dont les travaux ont fini dans les temps, héberge jusqu’au 1er avril des plongeurs tricolores sevrés d’infrastructures. En effet, depuis la fermeture pour rénovation du stade nautique Maurice-Thorez de Montreuil (du 31 mars 2023 au 31 mai 2024), seul bassin en Ile-de-France à disposer d’un sautoir à 10 mètres et d’une fosse (!), les Bleus naviguent en eaux troubles. Et doivent recourir au système D pour trouver des sites en mesure de les accueillir. « Même si ce n’est que pour quelques semaines, cela représente un soulagement immense de pouvoir s’entraîner au Centre aquatique, on savoure chaque minute, livre Clémence Monnery, entraîneuse de l’équipe de France. En termes de logistique, c’est un gros poids en moins. On se préserve également physiquement et mentalement car depuis un an, on est tout le temps sur la route », entre les entraînements outre-Rhin et les stages à Dubaï ou à Londres, des destinations bien dotées question installations.

Sourire aux lèvres

Le reste du temps, les coéquipiers du Montreuillois Gary Hunt, dix fois champion du monde de plongeon extrême (27 mètres) et engagé avec l’équipe de France pour participer au concours du haut-vol à 10 mètres synchronisé en compagnie de Loïs Szymczak, un autre Montreuillois, s’entraînent à l’INSEP, où les plongeoirs n’excèdent pas 5 mètres. « On a appris à travailler différemment pour se jouer des contraintes, poursuit la coach. On consacre beaucoup de temps à la préparation physique avec des exercices au sol ou sur tapis », rappelant au passage que les plongeurs sont des gymnastes avant d’être des nageurs. Clémence Monnery compte aussi profiter de cette parenthèse enchantée au Centre aquatique pour rattraper le temps perdu. « Si sur 10 mètres, nous arrivons à faire une quarantaine de sauts par semaine et par plongeur, c’est très bien. Le secret est de ne pas s’arrêter, de garder le rythme car à cette hauteur la peur est vite arrivée, y compris chez les athlètes de haut niveau. Et en même temps, il ne faut pas dépasser un certain seuil de sauts car c’est un sport traumatisant : il faut trouver le juste équilibre », assure l’entraîneuse.

Sourire aux lèvres, visiblement bien dans leur maillot, les plongeurs enchaînent les sauts, à 3, 5 ou 10 mètres sous l’imposante charpente en bois du CAO. Si les tremplins ne sont pas encore équipés de planches et que l’eau du bassin n’a pas atteint sa température idéale (21 ° contre 26 à 28 ° habituellement) – le prix à payer quand on essuie les plâtres -, aucun ne boude son plaisir. « On ne pouvait pas rêver mieux. Cet endroit est parfait, j’ai d’excellentes sensations, s’extasie Gary Hunt. Les gradins ne sont pas loin, on pourra vraiment ressentir le soutien du public. C’est un bel avant-goût de ce qui nous attend. » Inauguré le 4 avril en présence d’Emmanuel Macron, le Centre aquatique olympique recevra la première quinzaine de mai des épreuves tests qui permettront d’étudier le fonctionnement du site dans une configuration se rapprochant de celle des Jeux et de faire ressortir les éventuels ajustements à opérer. Le concours olympique du plongeon se tiendra du 27 juillet au 10 août.

Grégoire Remund

Photos: ©Nicolas Moulard

 

« Chez nous, à Paris, rien n’est impossible »

Entretien avec Gary Hunt, 10 fois champion du monde de plongeon extrême (27 mètres) et membre de l’équipe de France de plongeon.

A 4 mois des Jeux, comment vous sentez-vous ?

Bien, même si une blessure au mollet m’empêche de réaliser certaines figures. À vrai dire, je me sens de plus en plus fort chaque semaine et je suis certain que je serai prêt le jour J.

Avez-vous souffert de la fermeture l’an passé de la piscine de Montreuil, et plus généralement, du manque d’infrastructures en France ?

Cette absence d’installations est évidemment un handicap mais avec le temps, on a appris à faire avec et à s’adapter à n’importe quelle situation. Quand on fait ce sport en France, on sait à quoi s’attendre. À Montreuil, si les conditions étaient globalement bonnes, il fallait quand même composer avec les scolaires qui fréquentaient le bassin en même temps que nous et des créneaux horaires stricts. On a l’habitude d’être dans le dur.

Avec Loïs Szymczak, vous concourez au plongeon de haut vol à 10 mètres synchronisé : quelles sont vos chances de médaille ?

On a conscience que ce sera très difficile car il y a des nations, comme la Chine, la Russie et l’Angleterre, qui sont bien plus en avance que nous [l’unique médaille olympique française, en argent, a été remportée par Mady Moreau en 1952, à Helsinki, ndlr]. Mais chez nous, à Paris, devant un public acquis à notre cause, rien n’est impossible. Il faudra profiter des erreurs des adversaires pour faire un truc.

Allez-vous participer à la 14e édition du Red Bull Cliff Diving (compétition mondiale de plongeon à 27 mètres) pour tenter de remporter une 11e couronne mondiale ?

Après 98 étapes d’affilée dans cette compétition [il est le seul plongeur à avoir pris part à toutes les étapes depuis sa création, ndlr], je ne vais pas pouvoir prendre le départ de la prochaine édition car la priorité, ce sont les Jeux olympiques. Pour mon retour, je vise plutôt 2025, après, il sera temps de me retirer et de laisser la place aux jeunes.

Propos recueillis par Grégoire Remund

Le Centre aquatique olympique

Bordé par l’autoroute A86 et le Stade de France, ce nouvel écrin, entièrement conçu en matériaux bio sourcés et doté d’un toit recouvert de panneaux photovoltaïques, brille par son confort et sa modernité. À l’intérieur, le bassin recevra les épreuves de natation artistique, de plongeon et les phases préliminaires de water-polo. De 5000 places actuellement, la capacité de l’enceinte sera ramenée à 3000 après les Jeux olympiques et paralympiques pour faire place à des terrains de padel, une salle de fitness, des murs d’escalade ainsi qu’un espace de restauration. Placé sous la maîtrise d’ouvrage de la Métropole du Grand Paris, il deviendra, à compter de 2025, un symbole de l’héritage olympique dont les grands bénéficiaires seront les habitants, les clubs sportifs et les écoles. En 2026, il accueillera les championnats d’Europe de natation.

 

 

 

DÉCOUVREZ EN VIDÉO CI-DESSOUS NOTRE REPORTAGE DE 2022 CONSACRÉ A GARY HUNT

Gary-Hunt

En 2022, nous avions suivi l’étape parisienne du Red Bull Cliff Diving, à laquelle avait pris part Gary Hunt.

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