16 000 emplois étaient proposés au Forum “Les Jeux recrutent”, qui s’est déroulé mardi à la Cité du Cinéma de Saint-Denis. Dans beaucoup de secteurs, il reste encore des offres à pourvoir, comme dans la restauration, la sécurité ou les transports. Reportage.

« J’adore la cuisine. Je suis toujours à la recherche de nouvelles influences. Comme j’ai aussi un diplôme de restauration collective, je pense pouvoir faire l’affaire pour les Jeux. » Ce mardi, Youssef n’a pas besoin de parler beaucoup au moment de se présenter chez Sodexo. Son CV parle pour lui : école hôtelière au Maroc, expérience dans un restaurant thaï en France, formation en restauration de collectivité… Marine, chez Sodexo, l’invite comme d’autres candidats à déposer son CV en ligne et l’informe que la cantine des athlètes s’installera sous cette même halle de la Cité du Cinéma où se pressent ce jour-là près de 6800  candidat·e·s inscrit·e·s.

Youssef ouvre de grands yeux : une cantine pour les athlètes dans ce cadre prestigieux, il s’y voit déjà. A partir du 26 juillet 2024, date du début des Jeux olympiques et jusqu’au 8 septembre, date de clôture des Jeux paralympiques, 14 500 athlètes viendront en effet se restaurer quotidiennement ici, soit 60 000 repas journaliers. La Cité du cinéma se trouve en effet au coeur du village des athlètes, en voie d’achèvement à Saint-Denis et Saint-Ouen et qui sera le coeur battant des Jeux de Paris 2024.

181 000 emplois liés aux JOP

Pour l’heure, c’est une autre ruche qu’elle accueillait : celle de milliers de personnes venant postuler aux 16 000 offres d’emploi proposées ce jour-là par environ 50 entreprises. Restauration, sécurité, logistique, transports, entretien… la dernière étude en date du Centre de droit et d’économie du sport avait chiffré à 181 000 le nombre d’emplois générés par les Jeux. Des emplois dont les pouvoirs publics espèrent bien qu’ils auront une durée de vie au-delà de l’événement.

« La dimension de l’emploi fait évidemment partie de l’héritage que laisseront les Jeux en Seine-Saint-Denis, explique ainsi Stéphane Troussel, le président de la Seine-Saint-Denis. Mais cela a déjà commencé : sur les 3500 bénéficiaires des clauses d’insertion négociées sur les chantiers de la Solideo (soit 10 % des heures travaillées confiées à un public éloigné de l’emploi), plus de la moitié sont par exemple issus de Seine-Saint-Denis. »

Annie, elle, est venue ce matin de Bobigny pour tenter de trouver un emploi dans la sécurité privée. « Après plusieurs années comme gardienne d’école, j’avais envie de changer. Des amis m’ont dit que la sécurité recrutait. J’espère être prise. Les Jeux, je pense que c’est une opportunité à saisir », estime cette quadragénaire. Paul Duval, de la société Nouvel R Formation basée à Noisy-le-Grand, lui confirme que le secteur recherche notamment des femmes, et pas seulement pour les Jeux. « Chez nous, vous êtes non seulement formée, mais aussi embauchée dans la foulée en CDI s’il n’y a pas de problème. Après, je ne veux pas non plus vendre du rêve : c’est un métier exigeant, qui ne gagne vraiment bien que si vous faites des heures supplémentaires. Mais c’est aussi un métier où vous pouvez évoluer sans passer de diplômes supplémentaires », détaille ce jeune employeur.

Avec un besoin de 26 000 forces de sécurité privée pour les Jeux, le secteur fait en effet partie de ceux qu’on dit « en tension » : un diplôme, le PSGE, plus court que celui habituellement requis (Agent de Prévention et de Sécurité) a même été créé spécifiquement pour les Jeux.

On poursuit dans les allées de la vaste nef de la Cité du Cinéma. Devant le stand « métiers du sport », on tombe sur François. Ce jeune homme, trisomique, a fait le déplacement au Forum avec Access, une association qui vise à faire accéder à l’emploi des personnes handicapées. Passé déjà par plusieurs expériences dans l’accueil et l’encadrement de petits groupes, le jeune homme vient de s’entretenir avec la Fédération Profession Sports et loisirs pour y devenir éducateur. « Je suis intéressé par le métier d’éducateur. Ca s’est plutôt bien passé selon moi », estime le jeune homme, accompagné de son tuteur Yves Altazin. « Il y a des postes liés aux JO tout à fait compatibles avec les compétences de nos jeunes », confirme ce dernier qui espère bien que l’engagement d’inclusion pris par Paris 2024 se traduira dans les faits.

Turbine et espoirs

Arrivés à la hauteur d’une ancienne turbine – la Cité du Cinéma est une ancienne centrale électrique des années 1930, dont ont été gardés certains vestiges – on croise la route d’Anis, 19 ans et Diadouno, 24 ans, venus spécialement en car avec la Mission locale d’Aulnay. Le premier est engagé dans un BTS de cybersécurité, le deuxième dans un BTS management économique du bâtiment. Tous deux sont à la recherche d’une alternance qui pourrait leur donner une première expérience du monde du travail. Plein d’espoir, Diadouno a la bonne formule pour résumer l’événement du jour : « Les JO, c’est bénéfique à 100 % pour le territoire. Déjà, c’est un événement auquel on n’assiste pas tous les jours. Et c’est l’occasion de montrer au monde entier les talents qu’on a et peut-être aussi à la France ce qui se fait de bien en Seine-Saint-Denis.»

Christophe Lehousse

Photos: ©Nicolas Moulard

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